Vraiment?
Le Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC) et neuf de ses membres (dont l'UFC-Que Choisir) ont commandé une étude sur
le coût total de possession des voitures particulières.
Réalisée au niveau européen et au sein de neuf pays par le cabinet de conseil Element Energy et financée par l'European Climate Foundation (ECF), l'étude
compare les coûts de possession de véhicules essence, diesel, hybrides, hybrides rechargeables, électriques à hydrogène et électriques à batterie sur toute leur durée de vie, du premier au troisième propriétaire.
L'étude portant sur le coût de détention d'un véhicule a été publié en France par l'UFC-Que Choisir en juin 2021.
Le coût total de détention d'un véhicule prend en compte l'ensemble des charges supportées par un automobiliste possédant un véhicule, depuis l'
achat jusqu'aux frais de fonctionnement, notamment :
Le coût d'amortissement : il traduit la perte de valeur du véhicule au cours du temps et est défini comme la différence entre le
prix d'
achat du véhicule et sa valeur de revente.
Le coût/gain lié à la fiscalité : en France, il inclut entre autres la TVA payée à l'achat par le premier propriétaire, le
bonus écologique à l'achat d'un véhicule peu émetteur de carbone ou à l'inverse le malus écologique ou encore la taxe d'immatriculation («
carte grise »).
Le coût lié à l'énergie : cela comprend le carburant pour les véhicules thermiques et le coût de l'électricité pour les
véhicules électriques, ou encore l'hydrogène.
Les coûts d'entretien et d'assurance.Le coût de détention d'un véhicule est calculé pour trois tailles de véhicules (petit, moyen et grand) depuis la petite
citadine, le monospace et la berline jusqu'au
SUV.
On retrouve dans ces catégories :
Petit (
citadines) : par exemple,
Peugeot 208,
Renault Clio,
Renault Zoe ;
Moyen (monospaces compacts et
berlines familiales) : par exemple,
Peugeot 308,
Renault Mégane, Tesla Model 3 ;
Grand (SUV, grandes berlines) :
Peugeot 2008,
Renault Captur,
Hyundai Kona.
Pour des raisons de clarté, l'UFC-Que Choisir ne présente dans l'étude que les résultats graphiques des véhicules de taille moyenne.
L'UFC-Que Choisir explique, à contre-courant des idées reçues, que
« l'électrique s'avère déjà être le mode propulsion le plus rentable pour une voiture de taille moyenne ou petite ».A l'appui de cette affirmation
« à contre-courant des idées reçues », l'UFC-Que Choisir explique que pour un véhicule de taille moyenne (en France),
une voiture électrique achetée en 2020 demandera 64 600 euros de dépenses tout au long de ses 16 ans d'utilisation, contre 84 700 euros pour une voiture essence (soit 24 % de moins en électrique) et 76 400 euros pour une voiture diesel (soit 15 % de moins en électrique).
L'UFC-Que Choisir explique cet écart provient des
économies réalisées sur le budget énergie, largement inférieur pour l'électrique (8 000 euros d'électricité pour 30 000 euros d'essence ou 20 500 euros de diesel soit moins 73 % par rapport à l'essence et moins 61 % par rapport au diesel) et à la
subvention à l'achat d'un véhicule bas carbone qui ramène les dépenses d'amortissement à un niveau comparable entre motopropulsions (environ 28 000 euros).
Une lecture attentive mais accélérée de cette étude nous amène à la conclusion suivante : cette étude nous apparait
biaisée par certaines de ses hypothèses structurantes particulièrement favorables aux véhicules électriques, et notamment
une durée de détention de 16 ans,
un kilométrage moyen annuel important,
un coût de l'électricité stable et
des batteries capables de parcourir 214 000 km (alors que la garantie à 70% des capacités est limitée généralement à 8 ans et 160 000 km).
1 - Alors que
l'âge moyen du parc automobile roulant en France est de presque 11 ans, l'étude prend en compte une durée de détention de 16 ans, ce qui permet d'amortir artificiellement le coût de la batterie sur une durée rallongée, batterie qui représente environ un tiers du prix d'un
véhicule électrique. Cette hypothèse nous semble réduire artificiellement le coût d'amortissement du véhicule électrique.
2 - L'étude prend en compte
un kilométrage moyen de « 16 500 km par an sur 4 ans », de « 13 500 km par an sur 5 ans » et de « 11 500 km par an sur 7 ans ». Hors
le kilométrage moyen parcouru en France était en 2019 d'environ 8 900 km en voiture essence et 15 900 km en voiture diesel et en moyenne de 12 200 km. Il nous semble que cette hypothèse permet d'amortir le coût de la batterie sur un kilométrage plus important, batterie qui représente environ un tiers du prix d'un véhicule électrique sur une durée rallongée. Cette hypothèse éloignée de l'usage réel des automobilistes Français réduit artificiellement le coût d'amortissement du véhicule électrique. Cette hypothèse permet également d'augmenter artificiellement l'avantage que représente le coût lié à l'énergie du véhicule électrique.
3 - L'étude prend en compte
une hausse régulière du prix de l'essence et du diesel et une stagnation du prix de l'électricité (0,19 euro le kWh). Hors, des hausses très significatives du prix de l'électricité sont annoncées à partir de 2022.
4 - L'étude ne prend en compte
aucun coût de remplacement de la batterie tout en tablant sur une durée de détention de 16 ans et un kilométrage total de 214 000 km. Dans la mesure où la plupart des constructeurs offrent une
garantie de 8 ans limitée à 160 000 km à hauteur de 70% des capacités sur leurs batteries, l'hypothèse d'aucun coût de remplacement de la batterie semble biaisée. Les batteries au lithium-ion présentes dans les
voitures électriques se dégradent avec le temps. Elles ont
une durée de vie moyenne de 10 ans. Le prix d'une batterie en après-vente représente
plusieurs dizaines de milliers d'euros sur certains modèles de véhicules électriques.
A titre d'exemple:
Le prix en après-vente d'une batterie de 52 kWh utiles d'une
Renault Zoe est de 8 500 euros (source: L'Argus).
Le prix en après-vente d'une batterie de 46,2 kWh utiles (50 kWh bruts) d'une
Peugeot e-208 est de 15 600 euros (source: L'Argus).
Le prix en après-vente d'une batterie de 45 kWh utiles d'une Volkswagen ID.3 est de 12 320 euros (source: L'Argus).
Le prix en après-vente d'une batterie de 52 kWh utiles (55 kWh bruts) d'une Volkswagen ID.3 est de 13 750 euros (source: L'Argus).
Le prix en après-vente d'une batterie de 58 kWh utiles (62 kWh bruts) d'une Volkswagen ID.3 est de 15 070 euros (source: L'Argus).
Le prix en après-vente d'une batterie de 77 kWh utiles (82 kWh bruts) d'une Volkswagen ID.3 est de 19 120 euros (source: L'Argus).
5 - L'étude publiée en juin 2021 prend en considération un
bonus écologique à l'achat de 7 000 euros en faveur des véhicules électriques en 2021, tout en sachant que le bonus écologique à l'achat en faveur des véhicules électriques est ramené à 6 000 euros au 1er juillet 2021 et à 5 000 euros en 2022.
Alors qu'avec le bonus écologique, un petit véhicule électrique est, selon UFC Que Choisir, moins cher que son équivalent essence, sans le bonus écologique, le véhicule électrique ne serait pas rentable en France avant 2025 pour les petits modèles.
6 - L'étude explique prendre
« en compte les exigences croissantes sur les limites maximales de rejets polluants (par la norme Euro 7 entre 2002 et 2024) qui devraient augmenter les prix d'achat des véhicules thermiques dans les années à venir ». Formulé différemment, le coût d'amortissement du véhicule thermique est augmenté artificiellement sur la base d'une future norme d'homologation non votée et non applicable à ce jour. A ce jour, la norme d'homologation Euro 7, qui durcit les conditions d'homologation des véhicules thermiques, est en préparation au niveau de la Commission européenne. Elle vise à remplacer la norme Euro 6d en vigueur depuis le 1er janvier 2021 et entrera en vigueur à compter du 1er janvier 2025.
Une décision définitive sur la norme euro 7 est attendue à la fin de l'année 2021.
Il nous semble que les citoyens européens sont en droit d'être informés de façon transparente et sans biais par une étude financée par l'European Climate Foundation (ECF).
Source: étude sur le coût total de possession des voitures particulières du Bureau européen des unions de consommateurs (BEUC) et de neuf de ses membres (dont l'UFC-Que Choisir).