Les ZFE posent un problème d’injustice sociale
La logique des
ZFE (Zones à Faibles Emissions) repose sur celle des
normes Euro : une amélioration progressive des
performances des véhicules équipés de moteurs thermiques.
Mises en place en 1992, les normes Euro fixent des niveaux maximums d'émission pour différents polluants.
Les niveaux maximums d'émission polluante seront progressivement abaissés au fur et à mesure que les performances des véhicules s'amélioreront.
Les normes Euro 1 de 1992 sont remplacées par les normes Euro 2 en 1996, les normes Euro 3 en 2000
et par les normes Euro 6d en janvier 2020.
Ces normes sont censées accompagner et encourager une évolution des constructeurs et des équipementiers
automobiles.
Les ZFE ont quant un
objectif complémentaire, à destination des automobilistes :
accélérer le renouvellement du parc automobile pour diminuer les émissions polluantes. C'est-à-dire
faire acheter plus de voitures aux consommateurs.
Les ZFE (Zones à Faibles Emissions) reposent sur une logique de territoires.
La part du revenu disponible consacré aux transports croit logiquement en fonction inverse de la taille de la ville.
Or il existe des
inégalités profondes sur ce point.
« Toutes les personnes n'ont pas les mêmes besoins de mobilité et n'ont pas le même accès à des choix de mobilité. Les centres-villes denses regroupent des personnes qui travaillent souvent à distance réduite de leur lieu de domicile (le besoin de mobilité domicile/travail est modeste) et bénéficient d'une offre pléthorique en zone hyperdense.
A l'inverse, des gens habitant en lointaine banlieue doivent souvent parcourir plusieurs dizaines de kilomètre par jour et disposent en revanche d'une offre de transports (collectif, taxi, ou mobilités douces) réduite ». (Source : Laboratoire de la mobilité inclusive https://www.mobiliteinclusive.com/enquete-mobiliteemploi/).
Ces
inégalités géographiques face à la mobilité se superposent aux
inégalités sociales plus classiques. Et même s'il existe des exceptions importantes, les foyers modestes possèdent en général des véhicules plus anciens que les foyers aisés. En Ile de France, le département le plus pauvre, la Seine Saint-Denis compte 70 % de véhicules de catégorie inférieure à Crit'Air2 (qui sont interdits pendant les pics de pollution et qui devront théoriquement être remplacés en 2022). Dans les Hauts-de-Seine, département bien plus riches, ils ne sont que 48 %.
Le renouvellement d'une voiture fait peser un fardeau économique proportionnellement plus important sur les foyers modestes que sur les foyers plus aisés. (Source : https://france3-regions.francetvinfo.fr/paris-ile-de-france/paris/grandparis/circulation-differenciee-plus-moitie-du-parc-automobile-francilien-est-concerne-1691094.html).
Le problème d'acceptabilité des ZFE est tel que les collectivités ont largement
renoncé à sanctionner les contrevenants.
Lors des pics de pollutions, quelques agents sont placés en des lieux symboliques facilement accessibles (porte Maillot à Paris, par exemple). Mais pour l'essentiel, le respect de la règle n'est pas contrôlé.
Les promoteurs des ZFE demandent depuis des années à pouvoir mettre en place la vidéo-verbalisation.
Celle-ci n'est toujours pas mise en place alors que ce serait certainement nécessaire pour faire respecter les interdictions de circulation.
Le gouvernement
retarde la vidéo-verbalisation car il anticipe que sa mise en application donnerait le signal d'un mouvement de contestation puissant. Le souvenir des gilets jaunes est cuisant. L'épisode des bonnets rouges, qui s'étaient mobilisés contre l'
écotaxe, est dans toutes les têtes. Les opposants à l'écotaxe avaient détruit la plupart des portiques et des caméras, et amené l'annulation de l'écotaxe.
En cas de mise en place d'une vidéosurveillance automatisée des ZFE, il n'est pas impossible que des caméras de surveillance soient très rapidement vandalisées.
Source: Institut Brunoy - Pour une écologie des solutions - Septembre 2021